Cœur d’Acier
de Magali Mougel
Cœur d’acier , c’est l’histoire d’une vallée. C’est ici, dans cette vallée, que vivent Doris et Joseph, leurs enfants Anna et Bobby, et puis tous les autres. Tout aurait pu être autrement, cependant il faut s’accommoder du silence sans faille que cause l’extinction du dernier haut- fourneau de la vallée.
Alors que partout ailleurs, dans le reste du pays, tout le monde se moque de cette affaire, ici on continue la lutte, on garde la tête haute et on tente d’interpeler encore et encore les pou-voirs publics.
Le retour et l’annonce de l’ancienne tête de file des combats syndicaux, devenue aujourd’hui eurodéputée, n’apaisera rien : le site industriel est destiné à devenir un village vacances.
Inspiré par la fermeture des hauts-fourneaux de Florange et né d’une commande d’écriture passée à Magali Mougel, Cœur d’acier convie le public à un western social, sur des compositions de piano, guitare basse et lap-steel. Avec humour et cruauté, le Théâtre Exalté poursuit son cycle sur la dissidence, par le prisme de la sphère intime et familiale.
Cette commande d’écriture à Magali Mougel s’est appuyée sur ces quelques réflexions :
- la post-industrialisation comme démantèlement, non pas seulement de nombreuses entreprises, mais de paysages, de familles, de repères, d’une citoyenneté sans sol fertile.
- La question du syndicalisme et de sa transmission.
- La question du radicalisme aujourd’hui, dans ce monde au capitalisme triomphant.
Pourquoi faire appel à une auteure ?
Depuis quelques années, je recherche dans les textes dramatiques cette capacité qu’ont les auteurs à faire dialoguer l’indicible, ce qu’on ne saurait exprimer, ce qui manque de mots. Le Groenland de Pauline Sales est une confidence, Nina, c’est autre chose de Michel Vinaver est un gigantesque lapsus, Lune Jaune (…) de David Greig est une parole retrouvée. La prise de parole est un choix, un acte, et la prise de parole théâtrale doit être un acte essentiel. Entendons-nous, pas rhétorique, pas extraordinaire, essentiel. Il n’est pas le temps de l’actualité, du journalisme, mais celui du recul, de l’analyse, sociologique, philosophique et politique. Associer aujourd’hui l’Exalté à une auteure, c’est comprendre davantage ce que nécessite un verbe, et un verbe publique qui plus est.
En nous inspirant de divers événements conduisant à des actes de dissidence, nous ne souhaitons pas relater ce qui s’est déjà dit mais chiner ce qui ne l’a pas été, ce qui se cache, dans les familles, dans les bureaux, dans les couloirs, ou dans ces fameuses antichambres du théâtre classique. Ce projet est peut-être la fin d’un cycle, ou le début d’un nouveau ; l’envie sans doute d’emmener notre compagnie dans une démarche plus collective encore, de rassembler nos préoccupations de représentation et d’écriture, faire le choix d’une prise de parole publique et partager cette responsabilité.
Baptiste Guiton